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jeudi 1 février 2018

Les causes de décès

Si les généalogistes sont curieux de connaitre les conditions de vie de leurs ancêtres ils souhaitent également et tout naturellement connaitre les circonstances de leur mort. Malheureusement les documents susceptibles de nous renseigner à ce sujet sont extrêmement rares…

Cahiers Paroissiaux

Avant la Révolution, les curés ne notaient généralement pas la cause de la mort sur l’acte de sépulture : la vraie question était de savoir si, avant l'issue fatale, le défunt avait reçu les sacrements de pénitence, d'eucharistie et d'extrême-onction… Peu importait comment il quittait ce monde, pourvu qu’il puisse accéder au suivant !

Le curé jouissait cependant d’une certaine liberté dans la rédaction de ses actes et lorsque le décès était accidentel, notamment, il lui arrivait de le stipuler : peut être pour expliquer, justement, l'absence des derniers sacrements. On trouve ainsi des mentions de noyade, de mort dans les flammes d'un incendie, ou de toutes sortes de chutes : 
- d'un arbre (mort somme toute assez fréquente chez les bucherons)
- d'une falaise ou dans une marnière (voir le blog Magenea) ;
- et même sur un couteau ! (voir le relevé des actes curieux de la Région de Tinchebray sur le site d'Emmanuel Hamel)


Acte de Sépulture de Guillaume COSTE le 27 mai 1771 à Barneville Sur Seine (27) : "de la paroisse de la Bouille qui est tombé à l'eau de dessus le navire de son père le seize de mars dernier, étant agé d'environ sept ans"


Acte de Sépulture de "Jean Baptiste DANOIS agé de quatre ans et de Louis Emmanuel agé de deux ans tout deux enfants de Nicolas Adrien DANOIS domestique de cette paroisse et de Marie Anne HERPIN sa femme, péris de cette nuit dans les flammes" à Saussay la Vache (aujourd'hui Saussay la Campagne-27)
 
 
État Civil

En 1792, lorsque l'Etat civil vint remplacer les Cahiers Paroissiaux, le législateur prévut l'égalité de chaque citoyen lors de l'établissement de son acte de décès. Qu'il fut mort de vieillesse, de maladie ou tranché par la guillotine, qu'il fut catholique , protestant ou athé, qu'il finit ses jours chez lui, à l’hôpital ou en prison : rien ne devait apparaitre dans la rédaction de l'acte !


Article 85 du code civil.

Heureusement pour les généalogistes, certains officiers d’état civil prirent parfois leurs distances avec cette loi, tel de Maire de Beauficel en Lyons (27) qui du 13 février 1853 au 24 avril 1855 indiqua systématiquement les causes des décès dans une note en dessous des actes :

12.02.1853 FLAHAUX Nicolas Patrice, 78 ans, sabotier, « vieillesse » ;
17.06.1853 GOUFFIER Jérôme François, 42 ans, maréchal, « phtisie pulmonaire » ;
27.06.1853 PICARD Nicolas Binjamin, 31 ans, briquetier, « sarcocèle avec complication d’une tumeur cancéreuse ayant son siège dans l’hypochondre droit » ;
26.09.1853 MARAIS Rose, 75 ans, sans profession, « anasarque » ;
05.01.1854 HASARD Marie Catherine, 89 ans, « sénilité » ;
17.05.1854 PRANGERE louis Aimable, 74 ans, propriétaire, « maladies diverses et cancer en général » ;
06.09.1854 DEHAYER Rose Sophie, 63 ans, « cancer a l’estomac » ;
18.09.1854 COSSIN Marie Ludivine, 6 mois, « cholérine » ;
22.09.1854 FLAHAUT Romain Albert, 9 mois, « diarrhée » ;
27.09.1854 DELORME Aimée Hélène, 19 ans, « fièvre typhoïde » ;
06.10.1854 DOUIN Hector Edmond, 1 mois, « faiblesse de constitution » ;
19.10.1854 BORDIN Louise Palmyre, 6 ans, « fièvre typhoïde » ;
28.11.1854 DELAMARE Marie Rose, 84 ans, « sénilité » ;
03.03.1855 LANGLOIS François Amand, 70 ans, propriétaire, « catarrhe pulmonaire » ;
09.03.1855 BAILLET Marie Marguerite, 75 ans, « gangrène des orteils du pied droit » ;
21.03.1855 WOSSON WALTER Marthe Claire, 3 mois, « entérite » ;
07.04.1855 LONGUER Héloïse Stéphanie, 2 ans, « fièvre scarlatine » ;
25.04.1855 BELZER Charles Paul, 3 mois, « faiblesse de complexion »

Les mentions du maire de Beauficel permettent également de savoir quels sont les médecins qui interviennent dans cette commune en 1853-1855 : docteur Folleville de la Feuillie (7 certificats de décès), docteur Toulza de Lyons la Foret (6), docteur Delahaye de Lyons la Foret (2) et docteur Faburel de Morgny (2).

A Foret la Folie (27), en 1870, deux actes de décès, ceux de Jean François CAMPIGNY et de François Désiré LAINE, indiquent qu'ils furent tués par les Allemands (sur cet épisode de la guerre franco-prussienne voir le blog "Au fil des mots et de l'histoire")


Actes de décès de Jean François CAMPIGNY mort de "5 coups de feu donnés par les prussiens (bavarrois)" et de François Désiré LAINE mort de "2 coups de feu et percé de coups de baïonnette" à Foret la Folie (27) le 7 novembre 1870.

Dans un cadre légale, cette fois, les actes de décès peuvent également porter, depuis la Première Guerre Mondiale, une mention "Mort Pour la France". Dans ce cas des recherches dans les archives militaires en diront souvent beaucoup sur les circonstances du décès... (voir par exemple les recherches faites ici même sur Helier LEGOIX)



Attribuée, à l'origine, aux seuls militaires morts au combat, la mention "Mort pour la France" sera par la suite également décernée aux soldats morts des suites de maladies ou de blessures contractées au combat, puis aux civils tués lors des opérations (comme les bombardements liés au débarquement par exemple). Aujourd'hui encore cette mention est accordée aux militaires disparus dans les guerres auxquelles la France prend part comme en Cote d'Ivoire, au Mali ou en Libye.

A la mention "Mort pour la France" est venue s'ajouter la mention "Mort en déportation" en 1985 et les mentions "Mort pour le service de la Nation" et "Victime du terrorisme" en 2012.


Enfin l'adresse du décès, lorsqu'elle est différente de celle du domicile, peut donner des pistes sur les circonstances de la mort : s'agit t'il d'un hôpital, d'une maternité, d'un hospice ou d'une maison de retraite ?

A Paris il arrive que l'on lise dans l'acte de décès que "le corps a été transporté place Mazas" et que l'acte est été rédigé sur réquisition d'un employé de cette même "place Mazas". Il s'agit en fait de la morgue parisienne. Sont conduites ici les personnes décédées dans des lieux publics (notamment sur la voie publique) et celles décédées de morts violentes. Dans ce cas des recherches dans les registres de la morgue et les registres de mains courantes et de dépôts de plaintes des commissariats s'imposent ! Ces documents sont conservés aux Archives de la Préfecture de Police de Paris.



Registres des hôpitaux

Registre matricule hospitalier : la colonne des pathologies
Les archives des hôpitaux sont pour les plus récents conservés dans les hôpitaux eux même et pour les plus anciens aux Archives Départementales.

Les lacunes sont cependant très importantes et les délais de communicabilité très longs : 120 ans après la date de naissance de l’intéressé ou 25 ans après la date de son décès.

Deux types de documents sont ici intéressants : 

- les registres matricules, qui consignent l'état civil des patients, leur pathologie, ainsi que leurs dates d'entrée et de sortie ou de décès ;

- les dossiers médicaux qui indiquent, pour chaque patient, l'état de santé au jour le jour.



Extrait du dossier médical d'une patiente de l’hôpital de Navarre à Evreux (27) : "décédée le 19 avril 1898 à 4h45 du soir d'une congestion pulmonaire, le corps s'est décomposé avec une grande rapidité en raison de l'infection généralisé produite par les eschares".


 
 
Presse ancienne

La presse ancienne, enfin, apportera toute les précisions nécessaires pourvu que la mort soit accidentelle ou criminelle. Elle s’intéressera également aux décès des personnalités locales.

L'édition du 2 février 1900 du Journal de Bayeux relate les circonstances de la mort  de Jean Baptiste de Beaumont à Honfleur.

Au Havre, la noyade de Pierre Legall, dans le Journal de Rouen du 7 février 1900.

Le décès d'un centenaire, Pierre Coltée, dans le journal Le Normand du 8 janvier 1900.

dimanche 21 mai 2017

Eloges Funèbres






 Le 1er juin 1758, mourut à Anneville sur Seine (76) Marie Anne Lesdo, veuve de Nicolas Charles Mouret, Président aux Requêtes du Palais à Rouen, seigneur d'Anneville, de Grand-camp, du Pont et de la Prévoté de la Riviere.

Le prêtre Vallois, curé du lieu, se livre à un exemplaire exercice d'éloges funèbres : "C’était la dame la plus parfaite que j'aye jamais connue dans le monde..."



 

En voici l'acte de sépulture et l'éloge funèbre qui porte en marge le titre "réflexion" :


"Madame Dupont.
Ce jourd'huy premier juin mil sept cent cinquante huit a été par 
monssieur Labbé pernelle inhumé dans le Coeur de cette église, Le corps
de haute et puissante dame marie anne Lesdo de la riviere, Veuve
de haut et puissant seigneur nicolas charles mouret president au
parlement de normandie seigneur patron honoraires d'anneville 
décédée d'hyer munie des sacrements agée d'environ sixante et trois
ans, et en presence de haut et puissant seigneur messire henry charles 
jean francois de brevedent chevallier seigneur de sahurs,
d'anneville, berville, bardouville et autres Lieux son gendre et de messire
Louis francois Leonard Le carpentier d'auzouville, et de messire guillaume
nicolas mouchard chevallier et autre soussignées."



"Reflexion.
Si cette dame Dupont ci dessus nommée n'est point au ciel, je crois 
qu'il n'y en ira guère. C’était la dame la plus parfaite que j'aye jamais 
connue dans le monde elle scavait sa religion en théologienne et a 
toujours pû en servir de modèl. Sa vertu n'était point farouche, mais 
solide et véritable. Sa charité était sans bornes pour les défauts de son 
prochain, elle excusait même ceux qui lui avaient manqué : ils n'ont 
peut être pas cru mal faire disait-elle ; Elle avait une bonne âme 
qui la portait à secourir toutes sortes de personnes. elle était dun abord doux et 
affable pour tout le monde. tous ses vassaux allaient avec la meme confiance 
lui présenter leur requête ils en sortaient toujours contents et satisfaits. Son 
humeur était toujours égalle, gaie et scavante dans la conversation, 
parlant bien sur toutes les sciences, exceptées les mathématiques qu'elle ignorait.
Scavante sans penser libre, je ne scais ce qui l'emportait ou de sa grande 
vertu ou des belles qualités de son coeur et de son esprit. elle aurait mérité 
gouverner au royaume ; bien des gens d'esprit l'appellaient la reine des femmes. 
elle est enfin morte cette illustre et aimable dame régrétée et pleurée de 
tous ceux qui avaient l'honneur de la connaitre. Vixit. Vallois Ptre curé."




jeudi 9 mars 2017

Chronique du curé de Coudray (1785)


Sous l'Ancien Régime, les curés, chargés de rédiger les actes de baptêmes, mariages et sépultures, profitaient parfois de la dernière page du registre pour laisser quelques notes susceptibles elles aussi de traverser les époques.
 
Ces notes font souvent référence à des événements marquant pour la paroisse : intempéries, épidémies, faits divers...
 
En fin d'année 1785, le curé Halley, prêtre de Coudray dans l'Eure, nous transmet un résumé de la météo de l'année et de ses répercutions sur les récoltes et le prix des denrées.

Registre Paroissial de Coudray - 1785 - Archives Départementales de l'Eure


 
"L'hyver a été fort pluvieux et quantité de cidres 
ne sont point clarifiés, soit par rapport aux pluies 
de l'automne derniere et de l'hiver ; soit par rapport à 
La quantité de fruits ; soit enfin parce que L'on n'y 
avait point mis d'eau. Ils ont toujours été sans 
couleur et tres durs.
les pluies et les gelées ont retardé les mais. le temp est 
devenu beau, mais tres sec, ce qui en a empêché la pousse 
aussi bien que celle de l'herbe. La vie des animaux et 
devenue tres chere. le cent de gerbe de vesse a été vendu 
cent francs. Le Roi a donné la permission de mettre 
les bestiaux dans la forêt. le beure a valu à gournay 
quarante et cinquante sols La livre. il a diminué 
de prix, mais il a toujours été fort cher. La seicheresse a continué 
jusqu'en automne. Le cent de pois a valu depuis trois louis 
jusqu'à 80 livres.
La récolte du bled n'a pas été fort en gerbe, mais abondante en grain, 
trois gerbes au boisseau. il u a eu beaucoup de noir. Ce qui a fait tort. 
je L'ai degraissé en faisant jetter de l'argile pulvérisée sur la 
gerbe en le battant ; en le purgeant bien au crible à moulin ; 
et en y répandant ensuite de la terre d'ombe jeaune. Il y a eu 
une abondance de vin sans qualité. il n'y a eu ni pomme, ni poire 
nulle part. mon pressoir n'a point servi. halley curé du coudray."

Il est intéressant de noter que si le cidre tient une grande place dans le récit (tout le premier paragraphe et une partie du dernier) il est concurrencé par le vin : le raisin sera, en effet, cultivé dans l'ensemble des région française, y compris la Normandie, jusqu'à la crise du phylloxera dans la seconde moitié du XIXe siècle, époque a partir de laquelle la culture du raisin se réduira aux régions viticoles actuelles.

Le texte nous donne également une idée des cultures pratiquées dans cette paroisse. Outre les fruits auxquels il a déjà été fait allusion (raisins, pommes et poires) on commente également la culture du mais, des pois et du "bled" que l'on doit comprendre ici dans sont sens ancien qui englobe à la fois le blé, bien sûr, mais aussi l'orge, l'avoine, etc... 

Les mauvaises conditions climatiques entrainèrent également la raréfaction de l'herbe dans les pâtures. Sur le marché de Gournay en Bray le prix du lait, du beurre, de la crème et du fromage augmente considérablement. Or c'est en parti sur le marché de Gournay que s'approvisionnent les marchants de la capitale. Le Roi, soucieux des conditions de vie de ses paysans normands et du ravitaillement de ses "bons bourgeois de Paris" tente d’améliorer la situation en autorisant le bétail à paitre dans la Foret de Lyons qui à l'époque lui appartient en propre.

Cette chronique nous apprend également que le curé est un peu, si ce n'est cultivateur, du moins propriétaire terrien. Il nous livre d'ailleurs sa méthode pour tenter de sauver les blés abimés par le manque de pluie... Il possède par ailleurs son propre pressoir, qu'il regrette de ne pas pouvoir utiliser cette année !

mercredi 1 mars 2017

Dossiers d'Enfants Assistés

Lors d'une récente recherche je me suis intéressé à Julienne DUBOIS, né le 4 avril 1877 de Celina DUBOIS, blanchisseuse à Rouen et de père inconnu. Lorsque Julienne se marie, 20 ans plus tard, sa mère n'est pas présente et son domicile est inconnu. On apprend par ailleurs que Julienne est placée sous tutelle du Juge de Paix de Rouen... Pas de père, mère absente, tutelle du Juge de Paix, autant d'indices qui m'incitent à rechercher Julienne dans les archives des Enfants Assistés. 

Une fois retrouvé, son dossier, assez épais, présente une multitude de documents et de renseignements ! Tout d'abord des documents sur les circonstance de son abandon (elle avait alors 6 jours). 

Viennent ensuite de très nombreux feuillets sur son enfance. Elle est a cette époque placée chez une nourrice "à la campagne". Elle y reçoit très régulièrement la visite d'un inspecteur de l'Assistance Publique qui rédige un rapport : est-elle en bonne santé, bien nourrie, propre et bien habillée, bien élevée ? va t elle à l'école ? a t elle un lit pour elle seule ?... Certains documents concerne sa vaccination, son certificat d'étude, sa première communion... On y trouve aussi plusieurs lettres de la nourrice qui se plaint de ne pas avoir reçu du percepteur la pension d'un trimestre échu (30 Frs) ! 


Passé l'âge de 12 ans une autre vie commence pour Julienne, elle est alors placée chez un "patron" conformément à un "contrat de louage" passé entre l'assistance publique et celui-ci. Elle est alors servante chez un garde chasse, près de Dieppe, puis dans les faubourgs de Rouen chez un receveur municipal, un commissaire de Police, un sous inspecteur des Douanes... Placée ensuite chez un épicier, l'administration s’aperçoit que l'épicerie fait également office de débit de boissons... Sitôt on envoie Julienne chez un autre patron : pas question de compromettre sa moralité ! 




Julienne se plaint de sa nouvelle patronne : elle a un mauvais comportement et ne cesse de lui rappeler ses origines de "fille de l'Assistance". Heureusement Julienne se mariera bientôt : elle quittera donc l'Assistance Publique et cette patronne peu aimable... 





Si vous souhaitez me confier la recherche d'un dossier d'Enfants Assistés : consulter la page Prestations et Tarifs.