samedi 2 septembre 2017

Jules Durand

Les visiteurs du XXIVe Salon et Congrès National de Généalogie qui se rendront au Havre le weekend du 8 au 10 septembre prochain passeront peur être sur le Boulevard Jules Durand... Ce sera l'occasion pour eux de se remémorer la triste histoire de ce docker-charbonnier du Havre qui fut, bien malgré lui, placé au centre d'une affaire judiciaire souvent surnommée l'affaire Dreyfus du monde ouvrier ou l'affaire Dreyfus du pauvre...

Syndicaliste, il est en 1910, le principal meneur d'une grève qui entend s'opposer à l'extension du machinisme source de chômage... Accusé d'être le "responsable moral" de la mort d'un chef d’équipe non gréviste (qui en réalité fut tué lors d'une rixe entre ivrognes) il est, à l'issue d'un procès lors duquel le jeune avocat René Coty assure sa défense, condamné a mort. 

Une importante mobilisation favorise sa grâce : sa peine est commuée à sept ans de prison. Il est finalement libéré dès février 1911 et enfin totalement innocenté en 1918. Mais le stress du procès, l'annonce de sa condamnation à mort et les quelques mois passés en prison le font sombrer dans la démence et Jules Durand finira ses jours dans l'asile psychiatrique de Sotteville les Rouen où son cœur s'éteindra, bien après son esprit, le 20 février 1926.

Carte Postale Jules Durand
Carte postale envoyée par centaines au président Fallières pour réclamer la reconnaissance de l’innocence de Durand.


Sur Europe 1, dans son émission "Au Cœur de l'Histoire" Franck Ferrand était revenu sur cette tragique histoire :





L'association "Les Amis de Jules Durand" s'efforce de faire mieux connaitre ce personnage havrais.  

Quant à la généalogie de Jules Durand elle s'enracine profondément en Normandie, dans la région du Havre, à l’exception notable de la ligne agnatique : les Durand étant, en effet, originaires de Montauban. Ils quitteront cette ville pour exercer leur métier de préposés aux Douanes dans les ports de Bordeaux, de Nantes puis du Havre.


1
DURAND Jules Gustave
N Le Havre (76) 06.09.1880
+ Sotteville les Rouen (76) 20.02.1926
M Le Havre (76) 09.02.1901
ROUXEL Françoise Marie
N Fécamp (76) 13.08.1882
div. TC Le Havre (76) 19.12.1912

2-3
DURAND Gustave Louis
N Harfleur (76) 14.01.1855
+ Le Havre (76) 22.05.1913
M Hafleur (76) 01.03.1878
MABIRE Sophie Maria
N Octeville sur Mer (76) 07.11.1853
+ Le Havre (76) 30.03.1936

4-5
DURAND Jacques
N Bordeaux (33) 23.09.1826
+ Le Havre (76) 09.05.1874
M Le Havre (76) 20.05.1854
GOHON Mélanie Ernestine
N Harfleur (76) 08.08.1834
+ Harfleur (76) 21.01.1867

6-7
MABIRE Jean Pierre
N Octeville sur Mer (76) 29.12.1808
+ Octeville sur Mer (76) 09.02.1888
M Octeville sur Mer (76) 29.05.1841
LEVASSEUR Hortense Clémentine Rose
N Octeville sur Mer (76) 14.07.1820
+ Octeville sur Mer (76) 06.01.1885

8-9
DURAND Rémi
N Nantes (44) 21.02.1799
+ Bordeau (33) 05.01.1838
M Bordeaux (33) 29.05.1822
DUPUY Françoise
N Bordeaux (33) 07.05.1805
+ Bordeaux (33) 23.10.1829

10-11
GOHON Pierre Jacques
N Epretot (76) 21.04.1798
+ Harfleur (76) 21.12.1873
M Harfleur (76) 08.03.1834
QUESNEL Marie Catherine Rose
N Saint Romain de Colbosc (76) 23.03.1797
+ Octeville sur Mer (76) 04.11.1885

12-13
MABIRE Jean Baptiste Grégoire
N Octeville sur Mer (76) 08.07.1783
+ Octeville sur Mer (76) 04.07.1857
M Octeville sur Mer (76) 25.07.1807
LEBAS Modeste Anne
N Saint Supplix (76) 11.05.1782
+ Octeville sur Mer (76) 16.10.1859

14-15
LEVASSEUR Grégoire Martin
N Fontaine la Mallet (76) 19.09.1795
+ Octeville sur Mer (76) 24.12.1862
M Octeville sur Mer (76) 18.01.1816
TABARE Marie Rose
N Octeville sur Mer (76) 01.03.1796
+ Octeville sur Mer (76) 22.11.1824

16-17
DURAND Jacques
N Montauban (82) 13.03.1767
+
M Nantes (44) 15.09.1798
BAZIN Perrine Renée
N Angers (49) 1759
+

18-19
DUPUY André
N
+
M
BALADE Françoise
N
+

20-21
GOHON Jacques Pierre
N Les Trois Pierres (76) 13.03.1759
+ Saint Aubin les Cercueils (76) 23.05.1819
M Epretot (76) 17.02.1798
LECLERC Suzanne Scolastique
N Saint Aubin les Cercueils (76) 10.02.1775
+

22-23
QUESNEL François Antoine
N Saint Eustache la Foret (76) 07.03.1759
+ Graville (76) 05.09.1830
M Saint Michel du Haize (76) 02.12.1794
SAMSON Marie Catherine Rose
N Saint Michel du Haize (76)20.02.1772
+

24-25
MABIRE Charles Philippe
N Octeville sur Mer (76) 11.06.1733
+ Octeville sur Mer (76) 27.11.1805
M Octeville sur Mer (76) 13.11.1764
BANVILLE Marie Anne
N Octeville sur Mer (76) 30.06.1745
+ Octeville sur Mer (76) 25.01.1788

26-27
LEBAS Pierre Ambroise
N Octeville sur Mer (76) 06.07.1753
+ Octeville sur Mer (76) 25.03.1827
M Saint Supplix (76) 24.01.1780
PLANCHON Marie Anne
N Octeville sur Mer (76) 03.08.1753
+ Octeville sur Mer (76) 17.07.1813

28-29
LEVASSEUR Martin Laurent
N Fontaine la Mallet (76) 12.08.1763
+ Fontaine la Mallet (76) 15.02.1829
M Fontaine la Mallet (76) 10.07.1792
DUBOC Marie Rose
N Fontaine la Mallet (76) 13.06.1769
+ Fontaine la Mallet (76) 21.01.1828

30-31
TABARE Jean Baptiste Emmanuel
N Octeville sur Mer (76)12.08.1761
+ Octeville sur Mer (76) 04.10.1830
M Octeville sur Mer (76) 28.10.1794
HEBERT Marie Anne
N Octeville sur Mer (76) 03.03.1767
+ Octeville sur Mer (76) 28.03.1830



Acte de Mariage de Jules Durand en 1901 au Havre, il était alors sellier-bourrelier.

lundi 26 juin 2017

Vieilles Peaux !







Lorsque l'on présente des photographies de leur trisaïeule a des enfants, cette découverte s'accompagne parfois de cris d'effroi... Que porte l’arrière-grand-mère autour du cou ou jeté sur l'épaule ? Une peau de renard, toute entière avec la tête, les pattes et la queue !









Dès la pré-histoire, les fourrures animales furent utilisées par l'homme pour se tenir chaud que ce soit portées en vêtement, utilisées pour le couchage ou encore pour l’isolation de l'habitat notamment des sols. 

Si le traitement des peaux se faisait jadis au niveau local, souvent même au sein du foyer et de façon artisanale, la révolution industrielle du XIXème vint modifier la pratique. L'ouverture d'importantes manufactures aux abords des grandes villes augmenta la production et suscita une demande croissante de matière première. On vit alors apparaître le marchand de peaux de lapins : jusqu'au milieu du XXème siècle celui-ci parcourra la campagne, de fermes en fermes, pour acheter aux particuliers les peaux de lapins (ou de tout autre animal a poil !) que chacun stockait dans un coin de grange en attendant son passage.

Les marchands de Peaux de Lapins
Les marchands de Peaux de Lapins
Entre les deux guerres, il était même possible d'envoyer par la poste les fourrures que l'on avait récoltées. Dans les journaux, des réclames incitaient la population des campagnes a expédier dans les manufactures parisiennes les peaux des animaux d’élevage comme les lapins, mais aussi les peaux des animaux sauvages tués lors de la chasse : renards, putois, blaireaux, martres, fouines, loutres, belettes, hermines et même écureuils et taupes ! Plus étonnant encore : on chassait également le chat sauvage (animal aujourd'hui disparu de nos campagnes) et son cousin, deux à trois fois plus petit, le chat domestique ! 

S'il était possible d'envoyer par la poste sa production de peau, les réclames des journaux précisaient cependant : « N’expédiez pas de bêtes en chair. Vous risqueriez que la peau pourrisse en route ». 









Chaque peau avait son prix : de 400 Fr pour une peau de martre à 1,80 Fr pour une peau de taupe.

Face à ces écarts de prix certains fourreurs se faisaient fort d’apprêter la peau de lapin de telle sorte qu'elle passait aisément pour de la peau de loutre !








Lorsqu'elles n’étaient pas utilisées directement sous forme de fourrures, les peaux de lapins étaient parfois transformées d'une façon toute spécifique : le poil était coupé pour permettre la fabrication de chapeau en feutre, tandis que le cuir servait à la fabrication de colle, de gélatine et d'engrais ! A elle seule cette utilisation nécessitait 80 millions de peaux de lapins par an !!







Ainsi jusqu'à la seconde guerre, le commerce et l'industrie de la fourrure fleurissaient et pas une élégante ne serait sortie de chez elle sans son écharpe, son étole ou son manchon en fourrure. Cette mode bien confortable l’hiver, laissait place, les beaux jours venus, à une solution moins chaude et tout aussi décorative : le port de l'animal dans son entier négligemment jeté sur l’épaule...


dimanche 21 mai 2017

Eloges Funèbres






 Le 1er juin 1758, mourut à Anneville sur Seine (76) Marie Anne Lesdo, veuve de Nicolas Charles Mouret, Président aux Requêtes du Palais à Rouen, seigneur d'Anneville, de Grand-camp, du Pont et de la Prévoté de la Riviere.

Le prêtre Vallois, curé du lieu, se livre à un exemplaire exercice d'éloges funèbres : "C’était la dame la plus parfaite que j'aye jamais connue dans le monde..."



 

En voici l'acte de sépulture et l'éloge funèbre qui porte en marge le titre "réflexion" :


"Madame Dupont.
Ce jourd'huy premier juin mil sept cent cinquante huit a été par 
monssieur Labbé pernelle inhumé dans le Coeur de cette église, Le corps
de haute et puissante dame marie anne Lesdo de la riviere, Veuve
de haut et puissant seigneur nicolas charles mouret president au
parlement de normandie seigneur patron honoraires d'anneville 
décédée d'hyer munie des sacrements agée d'environ sixante et trois
ans, et en presence de haut et puissant seigneur messire henry charles 
jean francois de brevedent chevallier seigneur de sahurs,
d'anneville, berville, bardouville et autres Lieux son gendre et de messire
Louis francois Leonard Le carpentier d'auzouville, et de messire guillaume
nicolas mouchard chevallier et autre soussignées."



"Reflexion.
Si cette dame Dupont ci dessus nommée n'est point au ciel, je crois 
qu'il n'y en ira guère. C’était la dame la plus parfaite que j'aye jamais 
connue dans le monde elle scavait sa religion en théologienne et a 
toujours pû en servir de modèl. Sa vertu n'était point farouche, mais 
solide et véritable. Sa charité était sans bornes pour les défauts de son 
prochain, elle excusait même ceux qui lui avaient manqué : ils n'ont 
peut être pas cru mal faire disait-elle ; Elle avait une bonne âme 
qui la portait à secourir toutes sortes de personnes. elle était dun abord doux et 
affable pour tout le monde. tous ses vassaux allaient avec la meme confiance 
lui présenter leur requête ils en sortaient toujours contents et satisfaits. Son 
humeur était toujours égalle, gaie et scavante dans la conversation, 
parlant bien sur toutes les sciences, exceptées les mathématiques qu'elle ignorait.
Scavante sans penser libre, je ne scais ce qui l'emportait ou de sa grande 
vertu ou des belles qualités de son coeur et de son esprit. elle aurait mérité 
gouverner au royaume ; bien des gens d'esprit l'appellaient la reine des femmes. 
elle est enfin morte cette illustre et aimable dame régrétée et pleurée de 
tous ceux qui avaient l'honneur de la connaitre. Vixit. Vallois Ptre curé."




mardi 4 avril 2017

Le tragique destin d'Helier LEGOIX

Je vous propose aujourd'hui de passer les frontières de la Normandie pour nous intéresser au parcours militaire d'un soldat de la Grande Guerre, né à quelques kilomètres de là, à Wambez dans l'Oise, le 16 juillet 1889.

Registre Matricule LEGOIX
Extrait du Registre Matricule de Hélier Joseph LEGOIX - Recrutement de Beauvais, classe de 1909, Matricule 855

Au printemps de l'année 1910, Hélier Joseph LEGOIX passe, comme tous les jeunes hommes de son canton de Songeons, devant le Conseil de Révision. C'est là que les représentants du Prefet, des élus du canton et des autorités militaires déterminent, sur avis du médecin militaire, si tel ou tel conscrit est apte au service.

Registre Matricule LEGOIX
Extrait du Registre Matricule de Hélier Joseph LEGOIX
Après avoir mesuré sa taille et son poids et l'avoir examiné sous toutes les coutures, on ne trouva à Hélier qu'un petit défaut au lobe de l'oreille et un noevus dans le dos... Rien qui ne l’empêcha d’être déclaré « Bon pour le Service Armé ». Compte tenu de sa petite taille et de sa vigueur on estima même qu'il ferait probablement un bon chasseur à pied et on l'affecta au 8e Bataillon de Chasseurs à Pieds d'Amiens. Ses camarades furent quant à eux en majorité affectés au 51e Régiment d'Infanterie de Beauvais. 

Cocarde de Conscrit
Cocarde arborée par les conscrits
Probablement a-t-on fait la fête ce soir la à Songeons : le passage du Conseil de Révision donnait souvent lieu à la réunion de la fanfare, à un banquet dans un café, parfois même à l'organisation d'un bal ! Le photographe local venait immortaliser l’évènement. Sorte de rituel de passage à l'age adulte, être « bon pour le service » c’était aussi « être bon pour les filles » !

Hélier ne commença pas cependant son service militaire immédiatement : pour ne pas priver l'agriculture de la main d’œuvre nécessaire aux gros travaux des champs, les jeunes recrues n’étaient appelées à rejoindre leur régiment qu'à l'automne.
C'est donc le 4 octobre 1910 qu'il commença son instruction militaire, au bas de l'échelle, chasseur de 2e classe à la citadelle d'Amiens.


Citadelle d'Amiens - caserne du 8e Chasseur
Carte Postale : Citadelle d'Amiens, Caserne du 8e Chasseur

Il passe chasseur de 1ere classe le 1er avril 1912.
Le 25 septembre 1912 il est « envoyé dans la disponibilité », autrement dit libéré du service militaire. A cette occasion on lui accorde un certificat de bonne conduite stipulant qu'il « a tenu une bonne conduite pendant le temps qu'il est resté sous les drapeaux, et qu'il a constamment servi avec honneur et fidélité » (ce certificat était délivré à l'immense majorité des jeunes soldats, seul ceux ayant eu une punition supérieure à 8 jours de prison régimentaire se le voyaient en théorie refusé).

 
Revenu à la vie civile Hélier se marie à Ferrieres en Bray (76) le 29 novembre 1913 avec Julia Aimée CANU.

Le 1er août 1914, la Mobilisation Générale est décrétée. Dès le lendemain, Hélier arrive à la citadelle d'Amiens (1). C'est là qu'il apprend la déclaration de guerre le 3 août ; là aussi qu'il effectue une brève période d'exercices et de préparation et qu'il reçoit armes et bagages avant d’être envoyé au combat le 12 août.

 
Le bataillon rencontra pour la première fois l'ennemi le 20 août à Beuveille (54) et tenta de lui barrer la route à Arrancy (55) avant d’être contraint de se replier vers Verdun, à 40 km de là, où il embarquera en train, accomplissant, à l'image de toute l'armée française un gigantesque repli.


Bataille de Saint Gond
Carte Postale : Bataille des Marais de Saint Gond

Le 4 septembre, cependant, Joffre ordonne de cesser ce repli et de faire face : « Une troupe qui ne peut plus avancer devra, coûte que coûte, garder le terrain conquis et se faire tuer sur place plutôt que de reculer » ! Cette proclamation est accueillie avec joie par les soldats pour qui la retraite une est vraie souffrance morale ! La Bataille de la Marne s'engage.
Le 8e BCP (Bataillon de Chasseurs à Pied) combat alors dans les Marais de Saint Gond (51) puis à La Villeneuve, Soizy aux Bois, le bois de Botrait et Mondemont. Accompagnant le recul allemand, il gagne Aubérive sur Suippes et arrive le 28 septembre dans le secteur de Reims.

 
Fort de cette première victoire le bataillon quitte Reims le 21 octobre et à l'issue de 48 heures de chemin de fer est débarqué dans le secteur de Nieuport en Belgique, sur les rives de la Mer du Nord, pour prendre part à la Bataille de l'Yser dans le but d’empêcher les Allemands d'atteindre la cote. Tandis que l'armée belge a l'idée d'inonder ses terres pour en chasser l'ennemi, le 8e BCP s'illustre à Kloosterhock et Pervyse et le 2 novembre entre dans Dixmude. Là au coté des Fusiliers Marins, il s'élance à l'assaut du château défendu par les mitrailleuses allemandes.



Dixmude en 1914
Dixmude en 1914

Extrait du journal de Marches et Opérations du 8e Chasseur :

« 2 novembre : [...] 11h arrivée au cimetière de Dixmude occupé par les fusiliers marins. Attaque dirigée immédiatement (2e compagnie) sur le château ; attaque bientôt enrayée par des feux de mitrailleuses venant de la lisière du bois entourant le château. La situation reste la même jusqu’à 17 heure. Le bataillon est massé partie dans le cimetière dont la lisière est garnie, partie en arrière dans des tranchées abris. A la tombée de la nuit la 2e compagnie reprend le mouvement en avant et construit une tranchée en avant du cimetière. Une section de cette compagnie arrive a progresser jusqu'à une ferme qui est mise en état de défense.
3 novembre : Travaux de fortification jusqu'au lueur du jour. Le matin nouvelle attaque sur le château. La 2e compagnie en avant du cimetière, la 6e dans le prolongement vers la gauche, la 4e derrière le cimetière, la 3e derrière la 6e. Préparation d'attaque par l'artillerie lourde. L'attaque dirigée de nouveau contre le château reste sans résultat. Le soir la situation reste telle qu'elle était au levée du jour.
4 novembre : Prise de commandement du Commandant Clavel rentrant de convalescence. La journée est employée à faire glisser les hommes individuellement sur la face ouest du château par un ruisseau peu praticable. Dans la soirée, l'attaque dirigée sur ce nouveau front ne donne pas plus de résultats que les précédents. » 

C'est dans cet assaut qu'Hélier recevra sa première blessure : « Plaie au coté gauche par shrapnel ». L' « obus à balles » (ou shrapnel du nom de son inventeur) était largement utilisé à l'époque. En éclatant en vol, il libérait des balles métalliques sur le même principe qu'une cartouche de plombs.
Hélier fut donc évacué pour être soigné. Malheureusement aucun document n'a pu être retrouvé sur cet évacuation et cette convalescence. Sorti de l’hôpital, Hélier rentre au dépôt le 13 décembre 1914. Depuis le début de la guerre, le dépôt du 8e BCP, a quitté Amiens pour Luçon (2). Hélier y restera jusqu'au 3 février 1915, date à laquelle il fut renvoyé dans son bataillon, alors au repos.


8e Chasseur à Luçon
Carte Postale : Le 8e Bataillon de Chasseur à Pied à Luçon, dans l'attente du départ


Renvoyé au front en Argonne au mois d'avril, le 8e BCP participe aux combats de Maizeray, La Gruerie, le Four de Paris et Bagatelle. C'est lors de ce combat de Bagatelle qu'Helier fut une deuxième fois blessé « par éclat de bombe, au bras droit ». 


Extrait de l'Historique Régimentaire du 8e Chasseur
Extrait de l'Historique Régimentaire du 8e Chasseur : Argonne, Avril 1915

Brièvement soigné dans une ambulance installée à proximité immédiate du front, Hélier est aussitot que possible évacué à l’hôpital temporaire de Tauzé ou Cauzé (3) où il arrive le 13 mai. Passé au dépôt de convalescents d'Agen fin juin ou début juillet 1915 (4), il obtient une permission de 7 jours, avant de rentrer au dépôt du 8 BCP à Luçon le 11 juillet.
  
Parti aux Armées le 2 octobre, Hélier rejoint son bataillon quelques jours plus tard au camps de Mourmelon où le 8e BCP viens d’être mis au repos pour quelques semaines.

 
Le 25 décembre il est renvoyé au front. L’hiver se passe sans accident majeur. L'absence de combat ne fait cependant pas oublier les très dures conditions de vie dans les tranchées.



Extrait de l'Historique Régimentaire du 8e Chasseur
Extrait de l'Historique Régimentaire du 8e Chasseur : Noel 1915

Le 11 mars, le 8e BCP est envoyé dans le secteur de Verdun, à Thiaumont. Il y restera 20 jours avant d’être relevé.


Extrait de l'Historique Régimentaire du 8e Chasseur
Extrait de l'Historique Régimentaire du 8e Chasseur : Thiaumont, Mars 1916


 







Le 31 mars le bataillon est envoyé en camion à Bar le Duc ou il profite d'une semaine de repos. Le 2 avril il reçoit son nouveau chef : le commandant Savornin. Le 5 Hélier est promu caporal : il supervise désormais une escouade d'une quinzaine d'hommes.
  
 
Le 7 avril le 8e BCP retourne au front ou il participe le 9 et le 10 à la défense du Mort Homme.






  



















Le 9 avril fut malheureusement encore l'occasion d'une blessure grave pour Hélier LEGOIX : « blessé par éclat d'obus, plaies région sacro-lombaire ». Il n'arrivera que le lendemain à l'ambulance de Chaumont sur Aire avant d’être transporté le sur-lendemain à hôpital central de Bar le Duc. La blessure est grave et la convalescence va être longue : 

  • 29.04.1916-17.08.1916 : Hôpital complémentaire du Panthéon, 18 rue Lhomond à Paris ;
  • 17.08.1916-07.10.1916 : Hôpital auxiliaire N° 27 à Rosny Sur Seine ;
  • 07.10.1916-16.10.1916 : Centre Spécial de Réforme de Clignancourt ;
  • 16.10.1916-19.12.1916 : en permission pour poursuivre sa convalescence chez lui ;
  • 19.12.1916-25.12.1916 Dépôt du 8e BCP à Luçon ;
  • 25.12.1916-01.02.1917 : Hôpital auxiliaire N° 27 à Rosny Sur Seine ;
  • 01.02.1917-08.02.1917 : Centre Spécial de Réforme de Clignancourt ;
  • 08.02.1917-04.05.1917 : Dépôt du 8e BCP à Luçon ;
  • 04.05.1917-25.05.1917 : Hôpital Mixte de Luçon ;
  • 25.05.1917-28.09.1917 : Hôpital Complémentaire N°61 à Saint Laurent sur Sevre ;
  • 28.09.1917-27.11.1917 : Dépôt du 8e BCP à Luçon.

Le 19 octobre il passe devant la Commission de Réforme de la Roche sur Yon, et, compte tenu des séquelles de ses multiples plaies, il est « classé service auxiliaire apte à servir aux Armées ». Le 27 novembre, il est réaffecté au 3e Régiment d'Artillerie à Pieds.


Fort de Taillefer à Belle Ile en Mer
Fort de Taillefer à Belle Ile en Mer



 
Promu Maréchal des Logis le 1er février 1918 il est envoyé à Belle Ile en Mer. Au fort de Taillefer, à la pointe nord de l'ile, il est chargé de la surveillance des cotes.





 

L'Avenir du Morbihan 23 novembre 1918
Extrait de l'Avenir du Morbihan du 23 novembre 1918


Fin tragique, le 11 novembre 1918, Hélier Legoix décède lors de l'explosion accidentelle de son canon avec lequel il s’apprêtait à tirer une salve d'honneur pour fêter la fin de la guerre ! Deux canonniers servants furent eux aussi tués (5), d'autres furent blessés.



Monument aux Morts de Wambez
Monument aux Morts de Wambez et plaque commémorative de l’église de Wambez

 
A Wambez, le nom figure d'Hélier LEGOIX figure sur le Monument aux Morts et sur une plaque commémorative dans l'église.


Fiche Mort pour la France - Ministère de la Défense


1. En mai 1913, le 8e BCP avait été envoyé en garnison à Etain mais avait cependant gardé Amiens comme centre de mobilisation.
2. Amiens était situé à proximité immédiate du front et avait même était brièvement occupé en septembre 1914. Cette situation rendait impossible le maintien d'un dépôt militaire.
3. La lecture du registre matricule n'a pas permis de déterminer la graphie exacte de ce lieu qui n'a pu, par conséquent, être déterminé précisément.
4. Le registre matricule et le registre des malades du
dépôt de convalescents d'Agen ne s'accordent pas sur sa date d'admision. Il est cependant fort probable qu'il n'y resta qu'une seule journée : la derniere de juin ou la premiere de juillet.
5. Laurent DESLANDES (né le 25 juin 1883 à Plumergat) et François PENDEVEN (né le 9 janvier 1877 à Plouay)




Si vous souhaitez me confier une recherche sur la carriere militaire d'un soldat de la Guerre 14-18 : consulter la page Prestations et Tarifs.



samedi 18 mars 2017

Prénoms Révolutionnaires !


Aujourd'hui mes recherches ont notamment portées sur :

Fraise François BIDEAUX... Un prénom original s'il en est, mais qui s'explique par la date de naissance de l'enfant : le 30 mai 1794 ou plutôt le 24 Floréal II puisqu’à cette époque le calendrier grégorien a laissé place pour quelques temps au calendrier révolutionnaire.

Ce nouveau calendrier, qui commence le 22 septembre 1792, est composé de 12 mois de 30 jours auxquels s'ajoutent 5 jours complémentaires (6 pour les années bissextiles).

Le poète Fabre d'Eglantine fut chargé de nommer les mois. Il leurs donna des noms inspirés des saisons et des travaux agricoles :
Vendémiaire (22 septembre - 21 octobre) – Période des vendanges
Brumaire (22 octobre - 20 novembre) – Période des brumes
Frimaire (21 novembre - 20 décembre) – Période des frimas
Nivôse (21 décembre - 19 janvier) – Période de la neige
Pluviôse (20 janvier - 18 février) – Période des pluies
Ventôse (19 février - 20 mars) – Période des vents
Germinal (21 mars - 19 avril) – Période de la germination
Floréal (20 avril - 19 mai) – Période de l'épanouissement des fleurs
Prairial (20 mai - 18 juin) – Période des récoltes des prairies
Messidor (19 juin - 18 juillet) – Période des moissons
Thermidor (19 juillet - 17 août) – Période des chaleurs
Fructidor (18 août - 16 septembre) – Période des fruits


On demanda au même auteur de trouver un nom à chaque jour (remplaçant ainsi les saints du calendrier grégorien) :






Fraise François BIDEAUX étant né le 24 Floreal, jour de la Fraise, c'est tout naturellement qu'on lui donna ce prénom !

Dans le même registre de naissances (celui de Saint Laurent en Caux – 76) on trouve également la naissance de Marie Elizabeth Oignon
BARQ qui, bien sûr, est née le jour de l'Oignon, le 3 Messidor.

Dans son étude des naissances de l'an II à Paray le Monial, un généalogiste bourguignon relève des prénoms comme Balsamine, Giroflé, Jonquille, Orange, Tubéreuse, Tulipe, pour les filles ou encore Romarin, Jasmin, Plantin, Sureau et même Chou-fleur pour les garçons ! (voir son site ici)

Le 11 germinal XI (1er avril 1803) une nouvelle loi vint freiner cet engouement en interdisant les prénoms inspirés du calendrier révolutionnaire ! Seuls sont désormais autorisés les prénoms contenus dans le calendrier grégorien (retour des noms des saints donc !) ou ceux des personnages historiques. Les noms antiques avaient, en effet, une grande popularité après la Révolution. A Saint Laurent en Caux c'est l'Empire Romain qui inspire : aucun César mais pas moins de 9 Pompée !

20 Ventose III    BAUCHE Louis Pompé
7 Ventose IV    BOUST Jean Pompée François Samson
2 Ventose V    ANDRIEU Pierre Pompée

16 Ventose V    HOUSSAIS Jean François Pompée
9 Floreal V    BOCQUET Michel Pompée
30 Nivose VI    LE CONTRE Charles Pompée 
22 Floreal VI    BOUST Jean Désiré Pompée
22 Floreal VI    MARCHAND Pierre François Pompée
25 Termidor IX    ASSE Jean Baptiste Pompée

La Révolution passée on oublia donc les prénoms de fruits, de légumes et de plantes... Pas tout a fait cependant comme en témoignent les nombreuses Clémentine ou les souvent très jeunes Prune, Cerise ou Vanille...

En 2014 des parents ont voulu ré-créer le prénom Fraise (article de l'express). Le Juge aux affaires familiales estima ce prénom contraire à l'intérêt de l'enfant !!

jeudi 9 mars 2017

Chronique du curé de Coudray (1785)


Sous l'Ancien Régime, les curés, chargés de rédiger les actes de baptêmes, mariages et sépultures, profitaient parfois de la dernière page du registre pour laisser quelques notes susceptibles elles aussi de traverser les époques.
 
Ces notes font souvent référence à des événements marquant pour la paroisse : intempéries, épidémies, faits divers...
 
En fin d'année 1785, le curé Halley, prêtre de Coudray dans l'Eure, nous transmet un résumé de la météo de l'année et de ses répercutions sur les récoltes et le prix des denrées.

Registre Paroissial de Coudray - 1785 - Archives Départementales de l'Eure


 
"L'hyver a été fort pluvieux et quantité de cidres 
ne sont point clarifiés, soit par rapport aux pluies 
de l'automne derniere et de l'hiver ; soit par rapport à 
La quantité de fruits ; soit enfin parce que L'on n'y 
avait point mis d'eau. Ils ont toujours été sans 
couleur et tres durs.
les pluies et les gelées ont retardé les mais. le temp est 
devenu beau, mais tres sec, ce qui en a empêché la pousse 
aussi bien que celle de l'herbe. La vie des animaux et 
devenue tres chere. le cent de gerbe de vesse a été vendu 
cent francs. Le Roi a donné la permission de mettre 
les bestiaux dans la forêt. le beure a valu à gournay 
quarante et cinquante sols La livre. il a diminué 
de prix, mais il a toujours été fort cher. La seicheresse a continué 
jusqu'en automne. Le cent de pois a valu depuis trois louis 
jusqu'à 80 livres.
La récolte du bled n'a pas été fort en gerbe, mais abondante en grain, 
trois gerbes au boisseau. il u a eu beaucoup de noir. Ce qui a fait tort. 
je L'ai degraissé en faisant jetter de l'argile pulvérisée sur la 
gerbe en le battant ; en le purgeant bien au crible à moulin ; 
et en y répandant ensuite de la terre d'ombe jeaune. Il y a eu 
une abondance de vin sans qualité. il n'y a eu ni pomme, ni poire 
nulle part. mon pressoir n'a point servi. halley curé du coudray."

Il est intéressant de noter que si le cidre tient une grande place dans le récit (tout le premier paragraphe et une partie du dernier) il est concurrencé par le vin : le raisin sera, en effet, cultivé dans l'ensemble des région française, y compris la Normandie, jusqu'à la crise du phylloxera dans la seconde moitié du XIXe siècle, époque a partir de laquelle la culture du raisin se réduira aux régions viticoles actuelles.

Le texte nous donne également une idée des cultures pratiquées dans cette paroisse. Outre les fruits auxquels il a déjà été fait allusion (raisins, pommes et poires) on commente également la culture du mais, des pois et du "bled" que l'on doit comprendre ici dans sont sens ancien qui englobe à la fois le blé, bien sûr, mais aussi l'orge, l'avoine, etc... 

Les mauvaises conditions climatiques entrainèrent également la raréfaction de l'herbe dans les pâtures. Sur le marché de Gournay en Bray le prix du lait, du beurre, de la crème et du fromage augmente considérablement. Or c'est en parti sur le marché de Gournay que s'approvisionnent les marchants de la capitale. Le Roi, soucieux des conditions de vie de ses paysans normands et du ravitaillement de ses "bons bourgeois de Paris" tente d’améliorer la situation en autorisant le bétail à paitre dans la Foret de Lyons qui à l'époque lui appartient en propre.

Cette chronique nous apprend également que le curé est un peu, si ce n'est cultivateur, du moins propriétaire terrien. Il nous livre d'ailleurs sa méthode pour tenter de sauver les blés abimés par le manque de pluie... Il possède par ailleurs son propre pressoir, qu'il regrette de ne pas pouvoir utiliser cette année !